Trois exemplaires. 800 chevaux. 17 millions de dollars. La Pagani Zonda HP Barchetta pulvérise tous les records et referme en beauté 18 années de production de l’une des hypercars les plus iconiques de l’histoire automobile. Dévoilée en 2017 pour célébrer les 60 ans d’Horacio Pagani, elle incarne le testament mécanique absolu du constructeur italien.
Un cadeau d’exception pour marquer la fin d’une époque
2017, l’année des 60 ans d’Horacio Pagani
En août 2017, lors du prestigieux Concours d’élégance de Pebble Beach en Californie, Pagani surprend le monde automobile avec un modèle inédit. La HP Barchetta (HP pour Horacio Pagani) célèbre simultanément le 60ᵉ anniversaire du fondateur et les 18 ans de la Zonda, lancée en 1999 au Salon de Genève.
Ce modèle n’était initialement pas prévu au catalogue. Horacio Pagani souhaitait un cadeau personnel, une Zonda ultime qui synthétiserait tout son savoir-faire. Le projet prend forme dans le plus grand secret à l’atelier de Modène.
La HP Barchetta marque officiellement la fin de la production de la Zonda. Après près de deux décennies et des dizaines de versions spéciales, le rideau tombe sur cette lignée mythique. Les commandes one-off sur base Zonda restent possibles, mais la HP Barchetta représente le dernier modèle officiel de série, aussi limitée soit-elle.
Seulement trois exemplaires dans le monde
La rareté de la HP Barchetta dépasse tout ce que Pagani a produit auparavant. Seulement trois unités ont été construites, chacune destinée à un propriétaire précis.
Le premier exemplaire reste dans la collection personnelle d’Horacio Pagani à Modène. C’est la voiture originale, celle du dévoilement, qui ne quittera jamais les mains de son créateur.
Le deuxième a été vendu à Oleg Egorov, patron russe de TopCar Design et collectionneur compulsif de Pagani. Il possède l’une des collections les plus impressionnantes au monde : deux Zonda Cinque, une Zonda R, une Zonda 760 Roadster, une Zonda Tricolore et une Huayra BC. Sa HP Barchetta complète cet ensemble exceptionnel.
Le troisième et dernier exemplaire, livré en 2022, arbore une livrée intégralement noire avec une bande dorée centrale. Son propriétaire reste plus discret, mais l’identité de chaque détenteur est connue avant même la sortie d’usine. Impossible d’acheter une HP Barchetta sur catalogue : les trois ont trouvé preneur avant même leur fabrication.
Qu’est-ce qu’une barchetta et pourquoi ce design est unique
L’héritage du style barchetta
Le terme barchetta signifie littéralement « petite barque » en italien. Dans l’univers automobile, il désigne un roadster épuré, sans toit rigide ni pare-brise complet, où la carrosserie épouse le vent comme une coque de bateau.
Ce style remonte aux années 1940 et 1950, avec des Ferrari et Maserati de course dépouillées de tout superflu pour gagner en légèreté. La HP Barchetta réinterprète cette philosophie avec des codes contemporains et une radicalité assumée.
C’est la première Pagani à adopter ce design. Toutes les Zonda précédentes, même en version roadster, conservaient un pare-brise intégral et une structure plus conventionnelle. Ici, Pagani bascule dans l’extrême.
Les éléments de design qui la distinguent
Le pare-brise minimaliste frappe immédiatement. Nettement plus bas et étroit que sur les autres Zonda, il offre une protection minimale. Les vitres latérales suivent la même logique : réduites au strict nécessaire. L’expérience de conduite s’en trouve radicalement transformée, avec le vent et les éléments omniprésents.
Les carénages de roues arrière constituent l’autre signature visuelle. Inspirés des prototypes du Groupe C qui dominaient Le Mans dans les années 1980, ces couvercles aérodynamiques habillent les trains arrière et accentuent la fluidité des lignes. Aucune autre Pagani n’utilise ce traitement stylistique.
Détail fascinant : les roues arborent des inserts asymétriques. Côté gauche, les jantes intègrent des touches dorées. Côté droit, c’est le bleu qui domine. Cette dissymétrie volontaire souligne le caractère unique de chaque face du véhicule.
La HP Barchetta emprunte également des éléments à d’autres modèles Pagani. L’aileron arrière, les prises d’air et les blocs optiques proviennent de la série Zonda 760. Les sièges et les suspensions sont hérités de la Huayra BC, le modèle qui a succédé à la Zonda. Cette fusion crée un objet hybride qui résume l’histoire récente de la marque.
La mécanique la plus radicale jamais montée sur une Zonda
Un V12 Mercedes-AMG de 7,3 litres à aspiration naturelle
Sous le capot arrière bat le cœur le plus puissant jamais installé dans une Zonda. Le V12 Mercedes-AMG de 7,3 litres développe 800 chevaux à 6 200 tr/min et 850 Nm de couple à 4 000 tr/min. Ces chiffres placent la HP Barchetta au sommet de la hiérarchie Zonda, devant même la radicale Zonda R de circuit.
Le bloc provient de l’ancienne Mercedes Classe S Type 140 des années 1990, préparé et modifié par AMG. Cette base robuste et éprouvée permet des préparations extrêmes. Pagani collabore avec AMG depuis les débuts de la Zonda : chaque moteur est assemblé à la main à Affalterbach, en Allemagne.
Choix crucial : ce V12 reste atmosphérique, sans turbocompresseur. La Huayra BC, contemporaine de la HP Barchetta, affiche une puissance identique (800 ch), mais grâce à un V12 bi-turbo. Horacio Pagani a volontairement opté pour l’aspiration naturelle, privilégiant la linéarité de la montée en régime et surtout la sonorité brute d’un douze cylindres non bridé.
À 8 000 tr/min, le hurlement du V12 dépasse tout ce qu’on entend habituellement sur route. Pas de filtre turbo, pas d’atténuation : juste la symphonie métallique des pistons, bielles et soupapes. Dans une barchetta sans toit, l’effet sonore devient total.
Performances et expérience de conduite
Avec un poids contenu autour de 1 250 kg, la HP Barchetta affiche un rapport poids/puissance de 1,56 kg par cheval. Cette donnée la place parmi les hypercars les plus véloces de sa génération.
Le 0 à 100 km/h s’expédie en environ 3 secondes, le 0 à 200 km/h en moins de 10 secondes. La vitesse maximale atteint 350 km/h, mais sur une barchetta sans toit rigide, rouler à de telles allures relève de l’expérience sensorielle extrême. Le vent, le bruit, les vibrations : tout rappelle que cette machine ne triche avec rien.
La boîte manuelle à 6 rapports est un autre choix délibéré. À une époque où les hypercars adoptent massivement les doubles embrayages robotisés, Pagani maintient la transmission mécanique pour préserver l’engagement du pilote. Chaque changement de vitesse exige précision et timing. C’est plus lent qu’une boîte séquentielle, mais infiniment plus impliquant.
Les suspensions de la Huayra BC garantissent un comportement routier acéré malgré la puissance. Le différentiel autobloquant mécanique répartit le couple entre les roues arrière pour optimiser la motricité. Les freins carbone-céramique de 380 mm à l’arrière assurent des décélérations brutales, indispensables avec 800 chevaux.
Pourquoi 17 millions de dollars ? Décryptage d’un prix record
Les facteurs qui expliquent cette valorisation
Le prix affiché de la Pagani Zonda HP Barchetta oscille entre 15 et 17,5 millions de dollars selon les sources, avec la fourchette haute généralement retenue. Ce montant pulvérise le précédent record détenu par la Rolls-Royce Sweptail (13 millions de dollars environ).
La rareté absolue justifie d’abord ce tarif. Trois exemplaires, c’est moins que presque toutes les hypercars de l’histoire moderne. Même les Ferrari limitées comme la LaFerrari Aperta (210 unités) ou la Bugatti Divo (40 unités) semblent produites en série à côté.
Ensuite, la HP Barchetta clôture définitivement la production de la Zonda après 18 ans d’existence. Elle devient mécaniquement le dernier chapitre d’une saga automobile. Les collectionneurs valorisent toujours les modèles qui ferment une lignée historique.
La fabrication artisanale entre également en ligne de compte. Chaque Pagani est assemblée à la main dans l’atelier de San Cesario sul Panaro, près de Modène. Pas de robots, pas de chaîne. Des artisans qualifiés façonnent chaque pièce, vérifient chaque soudure, polissent chaque surface. Le temps de construction d’une HP Barchetta se compte en mois.
Les matériaux employés dépassent les standards de l’industrie. La structure mêle carbone et titane dans un composite baptisé carbo-titane, plus léger et plus rigide que le carbone seul. La carrosserie en fibre de carbone apparente nécessite des centaines d’heures de travail. Les fixations en titane aéronautique, l’échappement en Inconel (alliage de nickel utilisé en aérospatiale), les jantes en magnésium forgé : chaque élément justifie son coût.
Enfin, le niveau de personnalisation offert aux trois clients est total. Couleurs, matériaux intérieurs, détails de finition : tout peut être adapté. Les deux exemplaires vendus ont bénéficié de spécifications uniques élaborées en collaboration directe avec Horacio Pagani.
Comparaison avec d’autres hypercars d’exception
À 17 millions de dollars, la HP Barchetta se positionne loin devant les hypercars de production même limitée. Une Bugatti Chiron Super Sport culmine autour de 3,5 millions, une Koenigsegg Jesko Absolut près de 3 millions, une Ferrari SF90 XX Stradale autour de 800 000 euros.
Seules les créations one-off sur commande atteignent des montants comparables. La Rolls-Royce Sweptail (13 millions), la Bugatti La Voiture Noire (environ 12 millions) ou certaines Ferrari Special Projects personnalisées pour clients fortunés gravitent dans cette stratosphère financière.
La différence ? Ces voitures sont véritablement uniques, conçues pour un seul client. La HP Barchetta, malgré sa production de trois unités, reste un modèle « de série » dans la philosophie Pagani. Elle porte un nom de catalogue, même si ce catalogue ne compte que trois pages.
La valeur patrimoniale compte aussi. Les Zonda anciennes se négocient aujourd’hui à des prix supérieurs à leur tarif neuf. Une Zonda F de 2005 dépasse facilement 3 millions d’euros. Une Zonda Cinque atteint 5 millions. La HP Barchetta, summum absolu de la lignée, devrait logiquement voir sa cote exploser dans les décennies à venir.
Pour les collectionneurs qui achètent ces voitures, le prix d’acquisition importe moins que la certitude de posséder un objet unique, historiquement important et mécaniquement irréprochable. La HP Barchetta coche toutes ces cases.
L’accident de 2022 et la renaissance d’un trésor
Le crash lors d’un rassemblement en Croatie
En septembre 2022, l’un des trois exemplaires de HP Barchetta subit un accident spectaculaire. Le cadre : un rassemblement de supercars organisé par le Supercar Owners Circle dans les rues de Zagreb, capitale croate.
Sur une petite route de ville, l’exemplaire d’Oleg Egorov perd brutalement l’adhérence arrière. Les 800 chevaux envoyés sur les roues arrière prouvent leur capacité destructrice. La Pagani part en travers et percute de plein fouet une Ford Fiesta arrivant en sens inverse.
Les vidéos de l’accident circulent immédiatement sur les réseaux sociaux. L’impact arrache la roue arrière gauche avec tous les éléments de suspension et de freinage. La carrosserie en carbone mate côté conducteur est profondément endommagée. Le diffuseur arrière est détruit. Le montant des dégâts ? Plusieurs centaines de milliers d’euros, voire davantage.
Pour une voiture valant 17 millions, même un exemplaire accidenté reste potentiellement réparable. Pagani rapatrie immédiatement la HP Barchetta en Italie.
Deux ans de reconstruction chez Pagani
La reconstruction s’étale sur deux années, de 2022 à 2024. Pagani ne répare pas, Pagani reconstruit. Chaque pièce endommagée est refabriquée selon les spécifications d’origine.
Les panneaux de carrosserie en carbone doivent être tissés à nouveau, cuits en autoclave, usinés et polis. Les éléments de suspension en alliage aéronautique sont refondus. La roue arrachée est remplacée. Tous les systèmes électroniques et hydrauliques subissent un contrôle complet.
Particularité de cette réparation : Pagani ne modifie rien. Habituellement, lorsqu’une Zonda revient à l’usine après un accident, le propriétaire en profite pour demander des évolutions, des upgrades, de nouvelles spécifications. Des Zonda accidentées ressortent transformées en versions « Evo » avec davantage de puissance ou d’aérodynamisme.
Ici, non. Oleg Egorov souhaite retrouver sa HP Barchetta exactement comme elle était. Seul changement visible : les jantes passent du noir au gris argenté. Le reste demeure identique.
En 2024, la voiture réapparaît sur les routes. Les premières photos circulent sur les réseaux spécialisés. La qualité de la reconstruction est invisible : impossible de deviner qu’elle a subi un tel choc.
Détail étonnant révélé par le propriétaire : la coque accidentée d’origine n’a pas été détruite. Elle a été transformée en œuvre d’art murale, exposée comme une sculpture dans une collection privée. Même endommagé, un morceau de HP Barchetta conserve une valeur considérable.
Les propriétaires : collectionneurs d’exception
Les trois détenteurs de HP Barchetta ne sont pas des acheteurs ordinaires. Ils appartiennent à un cercle très restreint de passionnés qui possèdent les moyens financiers et les relations nécessaires pour accéder aux créations les plus exclusives de Pagani.
Horacio Pagani conserve naturellement le premier exemplaire. Fondateur de la marque, il roule occasionnellement avec ses propres créations, notamment lors d’événements privés ou de shootings photos. Sa collection personnelle comprend plusieurs prototypes et modèles uniques jamais proposés à la vente.
Oleg Egorov, propriétaire du deuxième exemplaire, dirige TopCar Design, entreprise russe spécialisée dans la personnalisation de véhicules de luxe. Sa collection Pagani est l’une des plus complètes au monde : deux Zonda Cinque (coupé et roadster), une Zonda R de circuit, une Zonda 760 Roadster, une Zonda Tricolore aux couleurs de la patrouille acrobatique italienne, et une Huayra BC. La HP Barchetta représente la pièce maîtresse de cet ensemble.
Le troisième propriétaire demeure plus discret. On sait que son exemplaire, entièrement noir avec bande dorée et détails or sur les étriers de frein et suspensions, a été livré en 2022. Les informations sur son identité restent confidentielles, comme souvent dans le monde des hypercars.
Ces trois collectionneurs partagent un point commun : une passion dévorante pour l’univers Pagani et une compréhension profonde de ce qui rend ces voitures si spéciales. Posséder une HP Barchetta ne relève pas du simple statut social. C’est reconnaître et préserver un morceau d’histoire automobile vivante.
Une œuvre d’art mécanique qui justifie chaque euro
La Pagani Zonda HP Barchetta ne se compare à rien. Elle referme 18 années d’excellence artisanale, 800 chevaux d’émotion brute et une rareté qui dépasse presque tout ce que l’industrie automobile a produit. À 17 millions de dollars, elle ne vise pas la raison mais l’émotion absolue. Pour trois privilégiés, elle incarne le summum de ce qu’une voiture peut représenter : un objet d’art roulant, rugissant et éternel.

