Dans l’univers très fermé des supercars italiennes, la Pagani Zonda F Roadster Clubsport occupe une place à part. Version découvrable et radicalisée de la mythique Zonda F, elle incarne le summum de ce que le constructeur d’Horacio Pagani a su créer avant de passer à l’ère Huayra. Avec une production limitée à 25 exemplaires et une fiche technique qui donne le vertige, cette voiture représente l’apogée d’une philosophie : allier l’art de la carrosserie en carbone à la brutalité d’un V12 atmosphérique AMG.
Qu’est-ce que la Zonda F Roadster Clubsport exactement ?
Une version qui cumule performance et plein air
La Zonda F Roadster Clubsport combine deux univers que tout oppose en apparence : le roadster, avec son toit amovible et sa structure ouverte, et la version Clubsport, pensée pour la piste avec un allègement radical et des réglages orientés performance pure. Là où d’autres constructeurs sacrifient la rigidité ou ajoutent du poids pour compenser l’absence de toit fixe, Pagani parvient à maintenir le même niveau d’équilibre que la version coupé.
Concrètement, la Roadster F possède un toit pliable à armature carbone centrale et toile latérale. Cette solution technique permet de conserver une rigidité torsionnelle exceptionnelle tout en offrant l’expérience sensorielle du plein air. La version Clubsport, elle, pousse encore plus loin l’utilisation de matériaux composites et bénéficie d’une préparation moteur plus agressive.
Une production ultra-limitée
Pagani n’a produit que 25 exemplaires de la Zonda F Roadster toutes versions confondues, Clubsport comprises. Certaines de ces voitures ont reçu la dénomination Final Edition, marquant officiellement la fin de la production régulière de la lignée Zonda F en 2010-2011. L’exemplaire numéro 24 sur 25, notamment, est devenu l’un des modèles les plus recherchés par les collectionneurs.
Cette rareté absolue s’explique par le positionnement de Pagani : chaque voiture est une pièce quasi unique, assemblée à la main à Modène, avec des options et des finitions souvent personnalisées selon les demandes des clients.
Les spécificités techniques qui font la différence
Le moteur AMG V12 7.3 litres porté à 650 ch
Le cœur battant de la Zonda F Roadster Clubsport, c’est le bloc Mercedes-Benz AMG M120 E72, un V12 atmosphérique de 7 291 cm³. Dans sa configuration Clubsport, il délivre 650 ch à 6 200 tr/min et surtout un couple phénoménal de 780 Nm dès 4 000 tr/min. Ce qui frappe, c’est la disponibilité du couple : 85 % sont accessibles dès 2 500 tr/min, offrant une souplesse déconcertante pour une supercar de cette trempe.
Le rapport poids/puissance atteint 1,89 kg/ch, un chiffre rarissime même aujourd’hui. Pour mémoire, la Ferrari Enzo de la même époque affichait environ 2 kg/ch. Ce moteur est accouplé à une boîte mécanique 6 rapports avec un embrayage biplaque et un différentiel autobloquant. Pas de boîte robotisée ici : Pagani mise sur l’engagement et la connexion entre le pilote et la mécanique.
Le carbo-titanium, l’arme secrète de Pagani
La structure de la Zonda F Roadster Clubsport repose sur un matériau composite baptisé carbo-titanium, un mélange de fibres de carbone et de titane. Ce procédé exclusif, développé par Pagani, offre une rigidité supérieure à la fibre de carbone traditionnelle tout en réduisant le poids global.
La carrosserie elle-même est entièrement réalisée en carbone Z-preg, un composite haute densité qui permet de sculpter des formes complexes sans compromis sur la solidité. Le résultat : malgré l’absence de toit rigide, la Roadster F conserve un poids proche de celui du coupé, autour de 1 230 kg dans sa version Clubsport, ce qui reste exceptionnellement léger pour une voiture de ce calibre.
Une aérodynamique redoutable
À 300 km/h, la géométrie de la Zonda F Roadster Clubsport génère environ 600 kg d’appui aérodynamique : 270 kg à l’avant, 330 kg à l’arrière. Cet équilibre permet de maintenir une stabilité impressionnante à très haute vitesse, malgré l’architecture roadster.
L’aileron arrière, à lui seul, est une œuvre d’ingénierie : tendu comme un arc, ultraléger, il se déploie automatiquement en fonction de la vitesse et de la décélération. Certains exemplaires, notamment les Final Edition, ont reçu des ailerons avant de type Cinque (empruntés à la Zonda Cinque), augmentant encore l’appui au train avant.
Le diffuseur arrière, les entrées d’air latérales et le capot moteur vitré (qui laisse entrevoir le système d’admission en alliage ultra-léger signé MHG) participent tous à l’efficacité globale. Chaque détail aérodynamique a fait l’objet de calculs précis en soufflerie et sur piste.
Performances et comportement sur route
Des chronos qui parlent d’eux-mêmes
En 2008, la Zonda F Clubsport (version coupé) a signé un temps de 7 min 24 s 44 sur la boucle Nord du Nürburgring, sous les mains du pilote allemand Marc Basseng. Ce chrono plaçait la voiture devant des références comme la Koenigsegg CCR, la Ferrari Enzo ou encore la Bugatti Veyron sur ce tracé mythique.
La version Roadster, légèrement plus lourde en raison de renforts structurels, a tourné en 7 min 29 s, soit seulement 5 secondes de plus. Un écart ridicule qui témoigne de la qualité du châssis et de l’équilibre général. À l’époque, ce chrono classait la Zonda F Roadster dans le top 10 mondial des voitures de route les plus rapides sur le circuit allemand.
Sur un parcours lancé, la vitesse de pointe dépasse les 345 km/h, même si Horacio Pagani reste volontairement modeste sur les chiffres officiels. Le 0 à 100 km/h est bouclé en environ 3,5 secondes, ce qui peut sembler modeste aujourd’hui mais reste terriblement efficace compte tenu du caractère intégral de la mécanique (pas de Launch Control, pas d’électronique invasive).
Un pilotage exigeant mais accessible
Contrairement à certaines supercars de l’époque, la Zonda F Roadster Clubsport n’est pas une machine ingérable. Le contrôle de traction Bosch est présent mais discret, laissant le pilote maître de ses décisions. Le freinage, assuré par des disques ventilés Brembo (355 mm à l’avant, 335 mm à l’arrière), peut être complété en option par des disques carbone-céramique, qui offrent une résistance à la fatigue thermique exceptionnelle lors d’utilisations sur circuit.
La direction à crémaillère assistée TRW reste communicative, sans être trop lourde. L’embrayage biplaque AP Racing demande un peu de technique en ville, mais devient naturel dès qu’on prend le rythme. Ce qui marque surtout, c’est la sonorité du V12 AMG : un rugissement grave, presque tellurique, qui monte en intensité jusqu’à 6 500 tr/min sans jamais devenir désagréable.
La Zonda F Roadster Clubsport Final Edition
La dernière des dernières
En 2010, Super Vettura UK, un distributeur britannique spécialisé dans les supercars exclusives, a passé commande d’une série limitée baptisée Final Edition pour marquer la fin de la production régulière de la Zonda F. Ces exemplaires, identifiables par leur finition carbone apparent mat et leur livrée souvent noire ou blanche, représentent l’ultime évolution de la lignée.
L’exemplaire numéro 24 sur 25, notamment, a été mis en vente en 2011 avec seulement 1 000 kilomètres au compteur. Cette voiture embarque les ailerons avant de type Cinque, un échappement sport encore plus sonore, et une sellerie en cuir gris avec des surpiqûres contrastées. Elle incarne parfaitement ce que Pagani sait faire de mieux : un mélange d’artisanat italien et de technologie de pointe.
Une finition et des détails uniques
L’intérieur de la Zonda F Roadster Clubsport Final Edition marie cuir noir, surpiqûres blanches et inserts en carbone apparent. Le volant Nardi en bois, héritage des voitures de course italiennes des années 60, contraste avec la modernité du tableau de bord où se mêlent cadrans analogiques et commandes en aluminium usiné.
Chaque détail a été pensé pour allier esthétique et fonctionnalité : le levier de vitesses en aluminium anodisé, les pédales en métal perforé, les sièges baquets en carbone recouverts de cuir. Même les rétroviseurs extérieurs, sculptés dans la masse, sont de véritables pièces d’orfèvrerie.
Certains exemplaires ont reçu des finitions sur mesure, comme la livrée Bianco Benny (blanc triple couche en hommage à Benny Caiola, premier client de Pagani) ou des inserts en carbone teinté. Chaque Zonda F Roadster Clubsport est ainsi unique, reflet des goûts de son propriétaire.
Valeur et statut de collection aujourd’hui
Une cote qui explose
En 2005-2006, lors de son lancement, la Zonda F Roadster était affichée à partir de 538 000 €, tandis que la version Clubsport atteignait environ 650 000 à 670 000 €. Une somme déjà considérable pour l’époque, mais qui reflétait le travail artisanal et la rareté du modèle.
Aujourd’hui, la valeur de ces voitures a littéralement explosé. Les Zonda F Roadster Clubsport se négocient entre 8 et 10 millions d’euros selon leur état, leur kilométrage et leur provenance. Certaines Final Edition, comme le numéro 24/25, ont été proposées à plus de 2,3 millions de dollars dès 2011, et leur valeur n’a cessé de grimper depuis.
Cette appréciation de plus de 1 400 % en moins de 20 ans s’explique par plusieurs facteurs : la rareté absolue (seulement 25 exemplaires), l’arrêt définitif de la production, et surtout la fin d’une époque. La Zonda F Roadster Clubsport représente les dernières heures du V12 atmosphérique sans compromis écologique, sans hybridation, sans downsize.
Pourquoi cette Zonda est-elle si recherchée ?
Les collectionneurs s’arrachent ces voitures pour plusieurs raisons. D’abord, le prestige de la marque Pagani, devenue une référence absolue dans le monde des hypercars. Ensuite, la perfection artisanale : chaque Zonda est assemblée à la main, avec une attention maniaque portée aux détails.
Mais surtout, la Zonda F Roadster Clubsport incarne un moment unique dans l’histoire automobile : celui où les supercars pouvaient encore se permettre d’être brutales, analogiques, dénuées de toute assistance électronique excessive. Pas d’écran tactile, pas de mode de conduite préprogrammé, pas de turbocompresseur pour respecter les normes d’émissions. Juste un V12, une boîte mécanique, et un châssis en carbone.
Cette authenticité, aujourd’hui disparue chez la plupart des constructeurs, fait de cette voiture un témoignage irremplaçable d’une époque révolue. Et c’est précisément ce qui fait grimper sa cote de manière spectaculaire sur le marché de la collection.
La Zonda F Roadster Clubsport n’est pas qu’une supercar italienne rare. C’est un manifeste roulant, une œuvre d’art mécanique qui rappelle qu’avant les normes, avant l’électrification, il existait des voitures qui ne cherchaient qu’une chose : offrir l’expérience de conduite la plus intense possible. Et ça, aucune hypercar moderne ne pourra jamais le reproduire exactement de la même manière.

